Lancement du projet ASTRO : « Astroturfing – Analyses, Stratégies, Techniques, Régulations et Observations »

Le Labfluens est ravi d’annoncer qu’une équipe de cinq professeur-e-s dirigée par Stéphanie Yates (Camille Alloing, Alexandre Coutant, Vincent Fournier et Olivier Turbide) a obtenu une subvention CRSH – Savoir pour un projet d’envergure sur le sujet de l’astroturfing.

Le projet sera développé de 2022 à 2026! Voici ci-dessous le résumé du projet.

Chaque jour nous sommes soumis à des injonctions s’efforçant à nous mobiliser pour des causes variées, à nous indigner d’évènements qui nous touchent, à soutenir les revendications de personnes qui nous ressemblent et à participer aux mouvements qui nous rassemblent. Pourtant, dans un monde dit « postfactuel », l’authenticité même de ces interpellations et de leurs manifestations dans l’espace public est soumise à caution :  est-ce vraiment une mobilisation spontanée à laquelle j’assiste ou participe ?

Outil de désinformation, de lobbying, de militantisme, mais aussi de relations publiques, l’astroturfing englobe un ensemble de stratégies de communication qui visent à simuler ou instrumentaliser des mouvements citoyens afin de soutenir des intérêts ​particuliers. Les techniques d’astroturfing sont multiples, de la construction de faux profils en ligne, à la création d’organisations présentées comme indépendantes. Le projet « ASTRO : Analyses, Stratégies, Techniques, Régulations et Observations » propose d’analyser de manière approfondie le développement de ces stratégies et techniques d’astroturfing encore peu étudiées, notamment en contexte canadien. ASTRO pose la question de recherche suivante : dans quels contextes, et suivant quelles modalités certains acteurs ont-ils recours à l’astroturfing ? 

ASTRO propose d’étudier les pratiques d’astroturfing dans une perspective globale et unifiée, en ligne et hors ligne, afin de permettre leur observation (comment les identifier?), leur qualification (comment les définir ?), leurs conséquences (quels sont leurs effets sur le débat public?) pour finalement envisager leur encadrement (comment y faire face?). Pour ce faire, le projet déploie une méthode de recherche mixte, appliquant un devis séquentiel exploratoire, qui se divise en 8 phases : analyse médiatique du phénomène en Amérique du Nord ces dix dernières années (1) puis recensement des initiatives d’encadrement pour produire une conceptualisation(2), élaboration d’une première typologie de pratiques (3), suivies d’étude de cas pour affiner les premières analyses (4), cartographie des acteurs pour appréhender leurs modes d’organisation (5),  visualisation de la circulation des contenus liés à ces cas pour en mesurer la portée médiatique (6), triangulation de l’ensemble des résultats pour produire un outil heuristique d’identification des stratégies et des techniques d’astroturfing (7), et enfin confrontation de ses résultats aux pratiques des acteurs de terrains, des institutions de régulation aux professionnels de la communication, pour tester la pertinence des résultats sur de nouveaux cas identifiés ou en devenir (8).

Les finalités concrètes de ce projet sont la production d’un outil interactif de diagnostic des actions d’astroturfing, l’élaboration d’une évaluation des effets du phénomène sur le débat public au Canada et de recommandations quant à sa régulation. Au final, le projet ASTRO permettra d’outiller les chercheurs en sciences sociales s’intéressant aux pratiques communicationnelles d’influence, les décideurs publics pour l’encadrement de ces pratiques, les professionnels de l’industrie pour une réflexion critique sur leur autorégulation, et les citoyens pour la reconnaissance des démarches d’astroturfing et ce, dans une perspective d’éducation à la citoyenneté et aux médias.